Justice et contrôle social. Autour du film Le Juge et l’Assassin de Bertrand Tavernier
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Cet article fait partie de « Droit et culture pop »
Un film inspiré d’une histoire vraie
§1 Le Juge et l’Assassin est un film français réalisé en 1976 par Bertrand Tavernier1. Ce film, son troisième long-métrage réalisé seul, est inspiré d’un fait divers qui a défrayé la chronique à la fin du XIXe siècle, « l’affaire Joseph Vacher »2. Tueur en série3, Vacher s’attaque dans le Sud-Est de la France à de jeunes bergers ou bergères qu’il mutile, éventre et viole avant de les mettre à mort. Ce périple meurtrier dure plus de trois ans jusqu’à ce que Joseph Vacher soit finalement arrêté grâce à la perspicacité du juge d’instruction Émile Fourquet. Ce dernier en tirera d’ailleurs un ouvrage4. Tavernier met en scène cette rencontre entre le juge et l’assassin, en modifiant toutefois les noms des protagonistes : à l’écran, Joseph Vacher devient Joseph Bouvier ; Émile Fourquet devient Émile Rousseau. Le premier est incarné par Michel Galabru qui recevra pour ce rôle d’assassin le César du meilleur acteur en 1977. Philippe Noiret prête quant à lui son visage, sa voix et son style au juge d’instruction Rousseau.
§2 Le film de Tavernier ne prend pas la forme d’une enquête policière à suspense dont le juge d’instruction serait la figure héroïque. Il propose plutôt une fresque sociale qui retrace un parcours criminel et soulève de nombreuses questions sur les causes de la criminalité, ainsi que sur le rôle de la justice et de la psychiatrie, aussi bien à l’aube du XXe siècle qu’au moment où sort le film en 1976.
§3 Le récit débute en 1893, avant que ne débute l’itinéraire meurtrier de Joseph Bouvier. Ce dernier est exclu de l’armée en raison de son comportement violent. Il s’éprend alors d’une jeune femme, Louise, à qui il propose en vain le mariage. Ne pouvant supporter d’être rejeté, Bouvier tente de tuer Louise, échoue, et retourne l’arme contre lui. Bouvier garde de cet épisode deux balles dans le crâne, entraînant une paralysie partielle du visage et la surdité totale d’une oreille. À la suite de cette affaire, il est déclaré irresponsable par la justice et enfermé dans un asile, dont il sort quelques mois plus tard, « complètement guéri » suivant l’avis des médecins.
§4 Bouvier vient alors rejoindre les rangs des vagabonds itinérants qui parcourent la France de part en part, à la recherche de travail souvent saisonnier ; vagabonds qu’on appelle également « chemineaux », car ils cheminent à travers le pays. C’est moins de cinquante jours après sa sortie de l’asile qu’il commet son premier crime : il assassine sauvagement une femme de 21 ans. À la suite de ce premier homicide et jusqu’à son arrestation, Bouvier commet au moins douze agressions mortelles.
§5 Parallèlement à ce parcours sanglant, Tavernier nous invite à suivre les efforts du juge d’instruction lancé sur la piste de Bouvier. Ce magistrat, Émile Rousseau, s’efforce de comparer et de rapprocher divers homicides s’étant produits à des endroits parfois fort éloignés. Faisant le lien entre ces crimes, Rousseau transmet une commission rogatoire à tous les parquets de France qui dresse le portrait de l’individu recherché :
§6 Cette commission rogatoire ne restera pas sans suite. Le hasard veut en effet que Bouvier soit, peu de temps après, arrêté en flagrant délit. Son profil correspondant à celui dressé dans la commission rogatoire, Bouvier est transféré à Belley afin d’être interrogé par le juge Rousseau. Ce dernier, persuadé qu’il tient là son assassin, tente d’obtenir des aveux. Le magistrat joue la carte de la séduction. Prétextant un intérêt pour la vie aventureuse qui est celle des chemineaux, il amène Bouvier à détailler son périple à travers la France, avant de lui signifier que les lieux par lesquels il est passé correspondent exactement aux lieux dans lesquels des crimes ont été commis. Bouvier est ainsi piégé. Dans un premier temps, il se mure dans le silence, mais il finit par offrir à son juge une partie des aveux que ce dernier réclame. On notera qu’aucun avocat n’apparait à l’écran et pour cause : à l’époque, la procédure criminelle ne prévoyait son intervention qu’au moment du renvoi devant une juridiction de fond même si une loi de 1897, d’application immédiate, exigea cette présence ce qui conduisit d’ailleurs à l’annulation partielle de l’instruction relative à Vacher, un incident de procédure sur lequel ne s’attarde aucunement le film de Tavernier5. Son propos est en effet ailleurs.
§7 Le magistrat doit en effet affronter une question aigüe soulevée par cette affaire, qui est mise en évidence dans la deuxième moitié du film : celle de la responsabilité pénale de Bouvier étant donné ses antécédents psychiatriques et son comportement durant l’instruction. L’assassin se caractérise en effet par un comportement étrange, excentrique, exalté. Il se prétend « l’anarchiste de Dieu » et affirme que ses actes sont dictés par la volonté divine. Serait-il fou ?
§8 Les médecins-experts déclarent toutefois Bouvier responsable de ses actes. Il est donc jugé. Tavernier laisse le procès hors champ, mais on apprend que Bouvier est condamné à mort, comme le fut le personnage réel, Joseph Vacher, condamné à la peine capitale par les assises de l’Ain et guillotiné le 31 décembre 1898.
La controverse intellectuelle des années 1890
§9 Au-delà du fait divers dont est inspiré le film, l’affaire Vacher est aussi l’occasion, dès la fin du XIXe siècle, de confronter les thèses d’une discipline scientifique alors naissante, qu’on appellera l’anthropologie criminelle, la médecine légale ou encore la criminologie. L’affaire Vacher va en effet alimenter une controverse de spécialistes qui agite la société française en 1897 : quelle est l’étendue de la responsabilité pénale des individus qui commettent des crimes tellement monstrueux qu’ils ne peuvent être le fait d’une « personne normale » ?
§10 Lors du procès de Vacher, c’est le Code pénal français de 1810, pétri des notions de rationalité et de responsabilité individuelles, qui s’applique sur ce point, en particulier son article 64 rédigé comme suit :
« Il n’y a ni crime ni délit, lorsque le prévenu était en état de démence au temps de l’action, ou lorsqu’il a été contraint par une force à laquelle il n’a pu résister ».
Toute l’affaire Vacher tournera donc autour de cette question à laquelle le film de Tavernier consacre l’essentiel de son propos : l’assassin doit-il échapper à sa responsabilité pénale dès lors qu’il pourrait être fou ?
§11 On connait la fin de l’histoire : plusieurs experts viendront, lors du procès, attester la responsabilité de Vacher6. Mais le débat ne s’arrête pas sur le billot de la guillotine qui tranche sa tête en 1898 ; il se poursuivra tout au long du XXe siècle. Des dizaines de chercheurs réexamineront le dossier criminel et médical relatif à cette affaire ; d’autres étudieront scrupuleusement les moules du cerveau de Vacher, soigneusement conservés et envoyés à travers toute l’Europe pour nourrir la phrénologie, cette discipline qui visait à corréler la morphologie du cerveau et du crâne aux comportements et aux caractères7.
§12 Autour des rapports d’autopsie, des comptes rendus psychiatriques et des mesures occipitales, ce sont en substance deux camps qui s’opposent autour du cas Vacher. Le premier rassemble les experts qui sont intervenus lors du procès et qui incarnent l’École française de l’anthropologie criminelle. Son chef de file, Alexandre Lacassagne, est désigné pour expertiser la santé psychique de Vacher ; il publiera d’ailleurs un ouvrage et plusieurs articles sur cette affaire8. Avec ses disciples, Lacassagne conclut à la folie simulée : Vacher n’est pas fou, il fait semblant. Les experts estiment que l’incohérence de ses propos ou la dimension grotesque du personnage ne sont que les preuves de sa tentative de manipulation. Le fait que Vacher lui-même revendique sa folie suscite le doute chez Lacassagne : « On n’a jamais vu un fou demander son hospitalisation avec tant d’insistance », écrit-il dans son rapport.
§13 Mais dès l’issue du procès, un deuxième camp s’empare du cas Vacher. Il est mené par Cesare Lombroso, professeur de médecine légale et auteur en 1876 d’un ouvrage pivot de la pensée criminologique moderne, L’homme criminel9. Lombroso analyse les coupes du moule cérébral de Vacher, et sa conclusion est sans appel : Vacher est fou et dangereux. Mieux, Vacher confirme la thèse centrale de la pensée de Lombroso : c’est un criminel-né. En conséquence Vacher ne peut être considéré comme responsable de ses actes.
§14 Ces deux écoles s’opposent donc sur le cas Vacher, l’une pour affirmer sa responsabilité pénale et l’autre pour l’y soustraire. Mais ces deux courants de la fin du XIXe siècle sont en réalité issus d’une même matrice épistémologique, celle du positivisme scientifique alors triomphant, selon lequel la criminalité est une réalité objective, déjà là, que l’on peut comprendre en remontant des symptômes à leur cause, souvent physique10.
§15 Plus d’un siècle après cette affaire, les progrès dans le domaine des neurosciences ou de la génétique continuent d’alimenter cette approche du crime. Et les controverses sur la responsabilité pénale des personnes souffrant psychiquement n’ont pas été vidées à l’occasion de la réforme du Code pénal français de 1992 et de la réécriture de son article 64, aujourd’hui 122-111.
§16 Personne, dans l’affaire Vacher, n’a jamais vraiment pris au sérieux le discours du patient lui-même, le récit personnel de ses souffrances. Pourtant, Vacher plaide sa propre folie et fournit plusieurs motifs permettant d’expliquer cette souffrance qu’il ne peut calmer qu’en tuant avec brutalité. Comme ses médecins, Vacher cherche en effet les causes médicales de son mal. Enfant par exemple, il aurait été mordu par un chien, contaminé par la rage, puis empoisonné par le remède censé l’en guérir. Vacher se confie en outre à son juge et raconte une trajectoire biographique émaillée de violences, qui aurait sans doute permis d’éclairer son profil criminel : enfant turbulent, Vacher est placé dans un pensionnat religieux où il aurait enduré et commis des sévices. Il prétend avoir rencontré un sort identique durant son passage par l’armée, et pire encore dans le cadre des traitements qu’il a subis lors de son premier internement psychiatrique à l’Asile de Dôle.
§17 Si l’on prend au sérieux le récit de Vacher lui-même, il ne serait donc pas un criminel-né, comme l’affirme Lombroso, mais un criminel construit, progressivement façonné dans les institutions françaises de la fin du XIXe siècle. C’est à ce titre qu’il se déclare plus victime que coupable et prétend que Dieu l’envoie pour révéler les malheurs de cette société qui l’a vu naître et grandir. On comprend pourquoi cette parole aussi lucide que subversive sur l’époque, aussi mystique qu’idéologique, sera écartée par la justice et la médecine françaises : c’est en effet à leur propre procès que Vacher les invite à procéder.
Le débat intellectuel des années 1970
§18 Si Tavernier choisit, au mitan des années 1970, de porter à l’écran cette histoire, c’est sans doute que le débat qu’illustre l’affaire Vacher trouve un nouvel écho dans la foulée de Mai 68 en France : des mouvements intellectuels et contestataires dénoncent en effet la médecine psychiatrique et la justice pénale, l’une et l’autre au cœur du film de Tavernier, un réalisateur par ailleurs convaincu « que le passé permet d’éclairer le présent »12.
§19 L’antipsychiatrie13, par exemple, prend pour cible la médecine des « fous » et ses méthodes thérapeutiques, en particulier l’internement. Elle remet en cause la scientificité de la psychiatrie et la médicalisation de la folie qui, sous des dehors de neutralité, renforceraient le caractère coercitif de l’institution médicale. L’antipsychiatrie propose au contraire d’aborder la folie par les sciences sociales, l’histoire ou la philosophie, et soutient que la médecine psychiatrique est un dispositif (parmi d’autres) de contrôle social.
§20 L’œuvre du philosophe Michel Foucault14 incarne, dans les années 1960 et 1970, cette réflexion sur les dispositifs de contrôle social, de la psychiatrie à la justice pénale. En 1971, il fonde, avec Jean-Marie Domenach et Pierre Vidal-Naquet, le GIP, le Groupe d’Information sur les Prisons, qui vise notamment à donner la parole aux prisonniers, et résume ainsi sa vocation contestataire : « Sont intolérables : les tribunaux, les flics, les hôpitaux, les asiles, l’école, le service militaire, la presse, la télé, l’État et d’abord les prisons »15. Foucault s’intéresse tout particulièrement aux dispositifs d’enfermement. Selon lui, l’enfermement sanctionne davantage l’irrégularité des comportements que l’infraction à la loi, et vise à la fois les criminels, les fous et les vagabonds. « Quoi d’étonnant si la prison ressemble aux usines, aux écoles, aux casernes, aux hôpitaux, qui tous ressemblent aux prisons ? »16. En outre, Foucault qualifie de coercitives la caserne, l’hôpital, l’usine, toutes ces institutions qui régulent la vie des individus et s’attaquent en particulier aux classes sociales les plus vulnérables, ces institutions qui apparaissent en toile de fond dans le film de Bertrand Tavernier.
§21 Le travail de Foucault sur les dispositifs de pouvoir et de contrôle social trouve donc dans Le Juge et l’Assassin une illustration particulièrement éloquente. Comme le destin de Vacher en témoigne – lui qui fut d’abord pensionnaire au sein d’une école catholique, militaire, puis malade mental interné, puis vagabond criminel, et enfin condamné à mort – c’est d’abord un « ennemi » social que permettent de désigner ces institutions, cristallisées à l’écran dans la figure du juge. Le film de Tavernier incarne donc l’esprit de son temps et s’inscrit dans une tradition critique à l’égard de la psychiatrie et de la justice pénale, que Foucault considère toutes deux comme des stratégies de pouvoir et de répression.
Michel Foucault, extrait d’un débat télévisé, en français et en anglais, entre Michel Foucault et Noam Chomsky, enregistré à l’École supérieure de technologie d’Eindhoven (Pays-Bas) en novembre 1971 et diffusé à la télévision néerlandaise
Le personnage réactionnaire du juge Rousseau
§22 L’affrontement entre le juge et l’assassin peut aussi être perçu à la lumière de la notion de justice de classes17. Le concept de justice de classe, inspiré de la pensée de Karl Marx mais développé surtout dans les années 196018, consiste à considérer l’institution judiciaire comme un organe de répression qui a pour fonction d’assurer la pérennité d’un ordre social établi, en l’occurrence celui de la domination de la bourgeoisie sur le prolétariat19. L’affaire Vacher, devenue l’affaire Bouvier dans Le Juge et l’Assassin, constitue un marqueur de cette domination : imbu de lui-même, réactionnaire, arriviste et manipulateur, de surcroît antisémite et antidreyfusard, le juge que nous présente Tavernier apparaît non seulement bourgeois, mais également conservateur d’un ordre social dont il est le produit20. Il en va d’ailleurs de même des médecins chargés d’examiner la santé mentale d’un Bouvier présenté comme une victime d’un système fait pour le maintenir dans sa condition précaire.
§23 Il s’agit indéniablement d’un parti-pris du réalisateur : le véritable magistrat de l’affaire Vacher aurait tout aussi bien pu être dépeint comme un enquêteur hors pair ayant mis un terme aux agissements de l’un des premiers et des plus sinistres tueurs en série de l’histoire judiciaire française21. À cette figure d’enquêteur héroïque, qui a anticipé certaines des techniques criminologiques qui seront développées au cours du XXe siècle, comme le profilage, Tavernier préfère le portrait d’un juge d’instruction qui, à l’ombre des jupes de sa mère, reste ce petit enfant désireux de recevoir les honneurs et la reconnaissance publique. Son obstination à attraper et à faire condamner Bouvier n’est pas présentée comme la marque d’un zèle professionnel, mais comme le symbole d’un acharnement névrotique contre un ennemi social. Dans le film de Tavernier, une guerre est menée par le corps judiciaire et le corps médical, une guerre contre les prolétaires, une guerre contre les asociaux, une guerre contre les anarchistes.
§24 Le cas Bouvier sert donc à dénoncer les ressorts idéologiques de la justice et de la psychiatrie, que le cinéaste déroule au moyen notamment de multiples références à l’Affaire Dreyfus, la grande affaire judiciaire de ce XIXe siècle finissant et qui apparait constamment en filigrane du récit.
« Pour Bertrand Tavernier, ce fait divers concentre tous les antagonismes du siècle dernier qui opposent justice et pouvoir, justice et folie, erreur judiciaire et expertise aliéniste, justice populaire et secret de l’instruction, cléricaux et anticléricaux, blancs et rouges, conservateurs et révolutionnaires. Révélatrice des conflits de classe, l’affaire Vacher pose la question de la légitimité de la peine de mort, question qui divise la société française à la fin des années 70 »22.
§25 Tavernier convoque ainsi le paradigme d’une justice politique par excellence, instrumentalisée au service d’un ordre réactionnaire. Et bien que le juge Rousseau s’en défende, tout dans l’affaire mise en scène par Tavernier est politique : la justice est politique dès lors qu’elle ne se contente plus d’appliquer la loi mais entend protéger la société vis-à-vis des éléments subversifs qui la menacent ; la médecine est elle aussi politique lorsque l’institution judicaire la somme de l’assister dans cette tâche de contrôle social ; même les relation humaines – par exemple entre le juge et sa maîtresse prolétaire – sont politiques, dès lors qu’elles s’insèrent dans un contexte plus général de lutte entre classes sociales aux intérêts divergents.
§26 Cette grille de lecture en termes de justice de classe conduit Tavernier à mettre explicitement en perspective, dans la scène finale du film, les douze crimes commis en 3 ans par Bouvier et les « 2.500 enfants de moins de 15 ans [qui] périrent dans les mines et les usines à soies » durant la même période. Comparer les meurtres d’un enragé et ceux engendrés par un système oppressif et inhumain revient bien à souligner que l’enragé lui-même porte la marque de ce système assassin, voire qu’il en est le fruit. Malgré la dimension sans doute simpliste et un peu caricaturale de cette démonstration, le film de Tavernier conserve une force d’évocation inépuisable. Les controverses sur la responsabilité des criminels, comme la crainte d’une justice de classe, restent en effet d’une évidente actualité. Près de cinquante ans après sa réalisation, le spectateur ne pourra qu’être interpellé par cette fresque tout à la fois politique, historique, sociale et judiciaire qui confirme que dans le chef de Tavernier, « aucune de ses œuvres ne fait abstraction du contexte politique ou social dont l’évocation n’est jamais sommaire, au point d’en former parfois l’intérêt principal »23.
Voir notamment sur ce film : Dayez B., Justice et cinéma. Quarante méditations sur la justice vue à travers le septième art, Louvain-la- Neuve, Anthemis, 2007, pp. 57-60 ; Flores-Lonjou M. et Miniato L., « Le Juge et l’Assassin : mise en scène d’une instruction pénale à la fin du XIXe siècle », publié sur le blog Droit et cinéma, consulté le 30 janvier 2024 in [https://lesmistons.typepad.com/blog/2010/12/le-juge-et-lassassin-b-tavernier-1976-france-mise-en-sc%C3%A8ne-dune-instruction-p%C3%A9nale-%C3%A0-la-fin-du-xix%C3%A8m.html] ; Guéry C., Justices à l’écran, Paris, PUF, coll. « Questions judiciaires », 2007, pp. 21-47. ↩
Cet article est tiré, dans sa version originale, d’un numéro de l’émission Les acteurs du droit consacré au film Le Juge et l’Assassin de Bertrand Tavernier, produite en 2017 par Vincent Lefebve, Julien Pieret et Julie Allard, et réalisée par Arnaud Dumanois avec l’aide de Léa Delion, pour Amicus Radio, consultée le 28 janvier 2023 in [https://radio.amicus-curiae.net/podcast/acteurs-droit-episode-1-juge-lassassin-de-bertrand-tavernier/]. Sur l’affaire Vacher, voir Leistedt S., Coumans N., Pham T.-H. et Linkowski P., « Psychopathologie du tueur en série », Annales Médico-Psychologiques, 2008, vol. 166, pp. 677-685, p. 678 ; Chevrier O., Crime ou folie. Un cas de tueur en série au XIXe siècle. L’affaire Joseph Vacher, Paris, L’Harmattan, coll. « Sciences criminelles », 2006 ; Deloux J.-P., Vacher assassin : un serial killer français au XIXe siècle, Paris, Claire Vigne Éditrice, coll. « L’autre histoire », 1995 ; Esposito F., Le tueur en série : étude de profils français à l’usage des praticiens, préf. Senon J.-L. et Leturmy L., Paris, LGDJ, 2011. ↩
Précisons qu’à l’époque cette expression n’existe pas encore ; elle ne sera popularisée que vers la fin du XXe siècle. Au XIXe siècle, dans la littérature scientifique, les meurtriers récidivistes sont parfois qualifiés de « monstres psychosexuels » ; voir les travaux du psychiatre allemand Richard von Krafft-Ebing, notamment in Psychopathia Sexualis, Paris, Payot, 1881. Pour désigner la pathologie de ces individus et dans les écrits qu’il consacra à l’affaire Vacher (cités infra), le médecin français Alexandre Lacassagne parle lui d’une personne atteinte de « monomanie homicide ». Voir sur ce sujet : Raoult P.-A., « Figures de la dangerosité : de la monomanie au tueur en série », Bulletin de psychologie, 2006/1, n° 481, pp. 31-39. ↩
Fourquet E., Les vagabonds. Les vagabonds criminels. Le Problème du vagabondage, préf. Alexandre Lacassagne, Paris, Marchal et Billard, 1908. ↩
Voir Guéry C., Justices à l’écran, op. cit., pp. 25-26. ↩
Voir notamment : Renneville M., Vacher l’éventreur. Archives d’un tueur en série, Grenoble, éd. Jérôme Million, 2019. ↩
Voir notamment : Renneville M., Crime et folie : deux siècles d’enquêtes médicales et judiciaires, Paris, Fayard, 2003 ; Renneville M., Le langage des crânes. Une histoire de la phrénologie, Paris, La Découverte, 2020. ↩
Voir notamment : Lacassagne A., « Vacher l’éventreur », in Archives de l’anthropologie criminelle, tome XIII, 1898, pp. 632-695 ; Lacassagne A., Vacher l’éventreur et les crimes sadiques, Lyon, A. Storck, 1899. ↩
Lombroso C., L’homme criminel : criminel-né, fou moral, épileptique : étude anthropologique et médico-légale, Paris, Félix Alcan Éditeur, 1887. ↩
Voir notamment : Renneville M., « L’affaire Joseph Vacher : la fin d’un “brevet d’impunité” pour les criminels ? », Droit et cultures. Revue internationale interdisciplinaire, 2010, vol. 60, p. 129-142. ↩
« N’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes.
La personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure punissable. Toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu’elle détermine la peine et en fixe le régime (…) Lorsque, après avis médical, la juridiction considère que la nature du trouble le justifie, elle s’assure que la peine prononcée permette que le condamné fasse l’objet de soins adaptés à son état » (C. pén., art. 122-1). ↩
Parizot D., « Tavernier, l’histoire et son enseignement », Le Débat, 2011/2, n° 164, pp. 46-51, p. 46. ↩
L’antipsychiatrie est un mouvement de contestation de la médecine psychiatrique, de son fondement – la maladie mentale – à des méthodes – en particulier l’internement. L’appellation « Anti-Psychiatry » apparaît dans les années 1960 chez les psychiatres David Cooper (1931-1986), Ronald Laing (1927-1989) et Aaron Esterson (1923-1999). Remettant en cause la réalité de la folie, dénonçant les traitements infligés aux patients et leur fonction sociale, l’antipsychiatrie nourrit une critique philosophique de la folie chez Michel Foucault dès sa thèse, en 1961 (voir Foucault M., Histoire de la folie à l’âge classique, Paris, Gallimard, 1972). ↩
Outre l’œuvre précitée, voir notamment : Foucault M., Surveiller et punir. Naissance de la prison, Paris, Gallimard, 1975. ↩
Le GIP enquête dans un prison-modèle : Fleury-Mérogis, Paris, Champ Libre, coll. « Intolérable », n° 2, 1971. ↩
Foucault M., Surveiller et punir. Naissance de la prison, Paris, Gallimard, 1975 p. 264 ↩
Voir notamment Allard J., « La justice de classe à l’écran », e-legal, Revue de droit et de criminologie de l’ULB, vol. 5, mis en ligne en novembre 2021, consulté le 30 janvier 2024 in [https://e-legal.ulb.be/volume-n05/droit-et-culture-pop-3/la-justice-de-classe-a-l-ecran-comment-le-peuple-est-il-represente]. ↩
Voir notamment : Bérard J., La justice en procès. Les mouvements de contestation face au système pénal (1968-1983), Paris, Presses de Sciences Po, 2013. ↩
Par extension, le concept désigne une justice inéquitable qui sanctionne plus durement le faible que le fort, le travailleur que l’employeur, le prolétaire que le bourgeois. « Admirez la justice capitaliste ! Si le propriétaire foncier, le propriétaire de maisons, l’homme d’affaires, sont expropriés pour causes d’améliorations, telles que chemins de fer, construction de rues nouvelles, etc., ils n’obtiennent pas seulement indemnité pleine et entière. Il faut encore, selon le droit et l’équité, les consoler de leur « abstinence », de leur « renoncement » forcé, en leur octroyant un bon pourboire. Le travailleur, lui, est jeté sur le pavé avec sa femme, ses enfants et son saint-crépin, et, s’il se presse par trop grandes masses vers les quartiers de la ville où la municipalité est à cheval sur les convenances, il est traqué par la police au nom de la salubrité publique ! » (Marx K., Le Capital, Livre I, Section 7, trad. Joseph Roy, Paris, Lachâtre, 1867 p. 114). ↩
En ce sens, voir : Flores-Lonjou M., Thirion N., « Le juge français et ses valeurs sous le regard cinématographique », Les Cahiers de la justice, 2022/1, n° 1, pp. 131-145, p. 145. ↩
Voir notamment : Deloux, J.-P., Vacher assassin : un serial killer français au XIX e siècle, op. cit. ; Esposito F., Le tueur en série : étude de profils français à l’usage des praticiens, op. cit. ↩
Raspiengas J.-C., Bertrand Tavernier, Flammarion, 2001, p. 189. ↩
Parizot D., « Tavernier, l’histoire et son enseignement », op. cit., p. 46. ↩